lundi 31 décembre 2018

Rose Tattoo : "Scarred for life"

Finalement, la pochette est quasiment identique à celle de l'album précédent ("Assault & battery"). Sauf qu'elle est en couleurs, et pas seulement les tatouages des boys cette fois...
Cet aspect "polychrome" de l'illustration est amusant à souligner car il reflète assez bien la substance musicale de "Scarred for life". Succédant donc à un "Assault & battery" particulièrement incisif, cru et assez linéaire, ce troisième album, sans aucun reniement de style, offre des compositions plus contrastées. 
D'ailleurs, le son lui-même a gagné en amplitude, perdant au passage la production sèche mais finalement très attachante de ce bon vieil "Assault"... Mais on se doute bien que l'épreuve du live unira l'ensemble du répertoire sous la même bannière : celle d'un hard rock australien abrasif et sentant la sueur.
Pour cela, "Scarred for life" pourra fournir une belle collection d'hymnes. En guise d'ouverture, le morceau-titre, insidieux mais très ouvert à la mélodie (même sur les couplets), et le fédérateur "We can't be beaten" (qui n'y est pas allé de sa plus belle voix de hooligan sur le refrain ?) sont là pour rappeler que les thèmes chers à Rose Tattoo sont toujours de mise : difficultés à s'insérer, marginalité, délinquance, gangs... Un peu plus loin, "Branded" ( pamphlet sur l'absence d'ascenseur social), "It's gonna work itself out" et sa slide guitar à la fête, ainsi que l'énergique "Dead set" (qui aurait tout à fait eu sa place sur "Assault") se chargeront d'alimenter plusieurs décennies de set lists endiablées. "Revenge", quant à lui, se pose en digne successeur de "The butcher and fast Eddie", à savoir un blues lent et lourd de menaces, et qui d'ailleurs explose littéralement à la fin (ce cri d'Angry Anderson...).
Au milieu de tout ça, le groupe propose quelques petites variations, en tête desquelles on placera "Sydney girls", titre semblant gorgé de soleil et qui voit les guitares se surprendre à singer une rythmique reggae. Plus traditionnel, "Who's got the cash" déploie quand même un sacré groove et peut-être un certain sens de l'humour, tandis que "Texas", avec son faux départ et son riff scandé presque caricatural, arrive à ses fins par des biais inhabituels mais très efficaces. 
"Scarred for life" : album de la maturité ? Oui, ça en a tout l'air...

vendredi 28 décembre 2018

Deicide : "Deicide"

Entre l'ouverture et la fermeture d'une porte monumentale (celle des Enfers sans aucun doute), à peine plus de 33 minutes de musique sont jetées en pâture à l'auditeur pour découvrir le death metal concis, chaotique et intense de Deicide.
Ce premier album enregistré en mars 1990 aux studios Morrisound Recordings, avec le producteur Scott Burns, porte en ses sillons la marque indélébile du son hyper compressé de l'époque : guitares étouffantes des frères Hoffman, basse peu audible de Glen Benton, batterie triggée à mort de Steve Asheim, qui clique en permanence. Steve étant le principal compositeur du groupe, son instrument est assez proéminent dans le mix, d'autant que Deicide se pose en défricheur d'un courant radical : le death brutal.
La plupart des titres de l'album ont pour thème le satanisme et le blasphème, mis à part "Lunatic of god's creation" et "Carnage in the temple of the damned", qui parlent respectivement des gourous maudits Charles Manson et Jim Jones. Ce qui nous conduit à évoquer le bassiste / chanteur du groupe, Glen Benton, personnage haut en couleurs, sataniste radical autoproclamé, dont le chant, bien aidé à l'époque par quelques effets, donne déjà l'impression que "c'est le diable lui-même qui est derrière le micro" !
L'ambiance est là, le décor maléfique est planté, mais c'est surtout la musique, poussé dans ses retranchements, qui va faire de ce disque une référence.
Jugez plutôt : des titres courts (2 à 4 minutes), des riffs qui tournent sans cesse et s'enchevêtrent, des blast beats parfois ininterrompus (ou presque) sur toute la longueur d'une composition ("Blasphererion", "Day of darkness"), des breaks vertigineux (en tête de tous, celui qui mène au refrain mythique et barbare de "Dead by dawn"). Dans ce magma, quelques petites variations : "Oblivious to evil", plus lent et rampant que ses confrères, et "Deicide", démarrant sur un riff macabre à la Slayer et possédant une structure plus élaborée (presque "progressive").
Des classiques comme s'il en pleuvait : les intouchables "Lunatic of god's creation" et "Dead by dawn" (piliers du death metal dans son ensemble), le très méchant "Blasphererion" (qui contient tout l'ADN de Deicide lancé à fond la caisse), "Sacrificial suicide" (virulent, fondateur, un peu plus lourd et contrasté que "Blasphererion" mais toujours présent dans les set lists), "Oblivious to evil", "Deicide"...
Le format court de cet album, son degré d'inventivité, sa virulence inédite à l'époque et jamais démentie en font ni plus ni moins le "Reign in blood" du death metal.