dimanche 11 août 2013

Pour aller plus loin autour de Supuration

Supuration, avec ses concepts et son death metal progressif / futuriste n'est pas un cas unique...
Kalisia : "Cybion"
"Cybion" est un chef d’œuvre français, paru en 2008 après 12 ans de gestation. Il s'agit d'un concept album de science fiction très cohérent et très abouti, avec des personnages, un langage (le "Kal"), des images somptueuses. Le livret est très fourni et se fait un plaisir d'expliquer tout cela. Musicalement, c'est carrément le paradis : l'auditeur s'immerge dans "Cybion", une pièce unique de 1 heure 11 minutes 11 secondes, découpée en 4 parties, chacune divisée en 4 sous-parties. Au programme : un death metal progressif virtuose, multi-facettes, très ambitieux, très inspiré et tourné vers le futur. Le pire est que ce disque n'est même pas difficile à appréhender (et puis il y a ce fabuleux thème musical récurrent, avec ses multiples variations, qui vient nous chatouiller les oreilles tout au long de l'écoute). Vraiment, ce disque est absolument fabuleux. Essayez-le puis... achetez-le.

SUP : "Anomaly"
Aimer Supuration c'est aboutir quasi forcément à SUP, puisque c'est le même groupe, avec l'aspect "death" mis en veilleuse, mais toujours la même soif de produire des concept albums futuristes. "Anomaly", le premier SUP,  raconte l'histoire d'un monde dominé par les machines et de l'inévitable faille dans le programme (l'élément déclencheur). La musique est difficile à décrire : sorte de métal indus froid, à la limite de la new wave technoïde, sur lequel planent des voix claires martiales. Parmi les six albums produits à l'heure qu'il est, "Anomaly" est mon préféré, musicalement, notamment parce que la réédition qui a eu lieu en 2000 propose l’œuvre originale mais aussi une version réenregistrée avec des arrangements différents (plus modernes) et des chansons supplémentaires qui offrent une nouvelle conclusion à cette histoire. Mais il faut bien voir que chaque disque a son concept et son caractère ("Imago", par exemple, est le moins métal de tous ; "Angelus" est étonnant avec ses interludes, son alphabet et ses deux livrets : l'un, classique, avec les textes, l'autre présentant l'histoire sous forme de nouvelle). A chacun de faire son choix dans cet univers.

Cynic : "Focus"
Avec cet album, qui a longtemps failli être "enfant unique", Cynic peut se vanter d'avoir influencé un bon nombre de formations avant-gardistes. Il faut dire que ce death metal technique est vraiment tourné vers les étoiles et utilise des moyens très particuliers pour parvenir à ses fins. Ce qui frappe le plus dans le son Cynic se sont ces voix robotisées qui hantent les morceaux, à part égale avec des growls plus conventionnels et, parfois, des chœurs féminins. Les instruments aussi sont non conformistes : guitares électriques et guitares-synthés, kit de batterie électronique et acoustique... Tous les moyens sont bons pour faire voyager l"auditeur dans une autre dimension, via des morceaux imprévisibles mais parfois entêtants (le refrain de "Veil of Maya").

Pestilence : "Spheres"
On pourrait appeler cela du death cosmique... Avec son "Spheres", Pestilence explore les mystères des galaxies, les trous noirs, l'infiniment grand. Ce qui est drôle c'est de voir écrit dans le livret : "Il n'y a pas de clavier sur cet album". Donc, tout ces sons "spectraux", ces clapotis, ces cordes frottées sont produits par des guitares-synthés de haut vol. Dommage, par contre, que les sons saturés sonnent un peu "chimiques"... Mais ce petit reproche mis à part, les 30 petites minutes de "Spheres" sont de toute beauté, avec une mention spéciale pour des soli aériens empruntés au jazz-rock ("Personal energy"). "Focus" ou "Spheres" ? S'il fallait vraiment choisir, je prendrais le bébé de Pestilence (c'est dire la qualité) !

Nocturnus : "Thresholds"
Difficile de ne pas succomber aux charmes d'un groupe de death metal qui héberge un claviériste à temps complet (c'est assez rare pour être mentionné) et qui ne parle pas de mutilation ou de zombies mais de science fiction... Impossible également de ne pas adhérer aux soli tourbillonnants d'un guitariste virtuose et aux nappes de synthé qui élèvent le death vers une autre dimension. Je me souviens des critiques de cet album qui déploraient que les growls du chanteur n'étaient pas très raccord avec l'aspect ambitieux de la musique... Sauf que Nocturnus a beau être un groupe progressif, c'est avant tout une formation de death metal et c'est bien de ce style-là dont il s'agit ici.
Un sublime album d'un groupe qui aurait pu être le Morbid Angel de l'espace, ni plus ni moins.

Atheist : "Unquestionnable presence"
 Atheist est le père de toutes les formations de death technique. Ses compositions, aux structures complexes, font appel à toutes les compétences, et on peut notamment remarquer que la basse se taille une part très importante dans le mix (ce qui donne parfois lieu à des passages "sautillants"). Pas de clavier : le son est plutôt dépouillé et tout est basé sur les riffs (de guitare ou de basse) et sur la construction labyrinthique des morceaux. Les thèmes abordés sont spirituels, scientifiques, philosophiques... Que du bon.

Obscura : "Cosmogenesis"
 Obscura : "Omnivium"
Avec son patronyme emprunté à l'album le plus complexe de Gorguts (vétéran Canadien de la scène death technique), Obscura est tout simplement le meilleur élève des Cynic, Atheist, Nocturnus et consorts. Les riffs sont vraiment le fruit d'une grande recherche en matière de composition et tutoient le génie de Morbid Angel à certains moments. Parmi les nouvelles recrues du death, Obscura est probablement mon groupe préféré. Longue vie !

Theory in Practice : "Colonising the sun"
Un album de death technique peu connu mais intéressant. Le clavier intervient sur certaines chansons, et notamment le monumental morceau-titre qui ouvre l'album. Après, on s'égare un peu dans un disque où la virtuosité a tendance à prendre le pas sur la composition. Se mérite.

Voïvod : "Lives"
On revient à l'origine de cette sélection car je pense que Supuration a beaucoup été influencé par Voïvod, un groupe qui, lui aussi, a développé un univers, des graphismes et des concepts totalement personnels. Ici, on fabrique depuis la fin des années 80 un techno-thrash froid, basé sur des riffs dissonants (la grande marque de fabrique du combo) servant d'écrin ambitieux à des histoires de science fiction écrites et illustrées par le groupe lui-même. On pourrait recommander l'un des albums studio de Voïvod, mais il y en a tellement qu'autant conseiller cet album live, forcément récapitulatif d'une partie de la carrière de ces Canadiens visionnaires.

Vektor : "Black future"
Encore un groupe de techno-thrash pour clore cette sélection. Vektor a sans doute écouté Voïvod mais aussi les américains fous de Watchtower, tellement sa musique est alambiquée, à l’image de certains de ses titres ("Deoxyribonucleic acid"). Bon à consommer, mais il faut s'accrocher...





samedi 3 août 2013

Darkthrone : "Circle the wagons" review

Darkthrone ne fabrique plus de black metal depuis l’album "The cult is alive".
La nouvelle tendance du groupe, c'est le métal typé années 80 : Maiden, Priest... et tous ces groupes qui ont osé aller plus loin dans la vitesse d’exécution ( les ambassadeurs du speed metal comme Exciter, et surtout Agent Steel que Fenriz, le batteur et parfois chanteur/bassiste de Darkthrone, vénère littéralement). On n'oubliera pas non plus les groupes qui ont aussi osé aller plus loin dans l'agression, comme Venom ou même Motörhead en son temps : il y a précisément de forts relents punk/rock chez le Darkthrone nouveau.
Voilà pour les influences. Pour le reste, sans changement notable depuis les tout débuts, le groupe prône toujours la "non-production", ce qui ne signifie pas un son pourri mais un son old school... Un son qui respire, Fenriz étant parti en croisade contre la compression, cet effet électronique qui a typé le son de pas mal de productions dans les années 90 (écoutez Napalm Death sur "Harmony Corruption", vous comprendrez).
Très old school aussi : la pochette, ainsi que les titres classés en Side A et Side B, alors qu'il s'agit d'un CD !
Hormis "Circle the wagons", pas mal de morceaux retiennent l'attention : "These treasures will never befall you" qui ouvre puissamment la "face A", "Running for borders" et son solo à la Maiden, "I am the graves of the 80s" pour le titre et l'ambiance speed/punk, "Stylized corpse" qui tantôt ramène au passé black du groupe et tantôt propose des riffs qui rappellent un peu Mercyful Fate... Etc. Ce ne sont que quelques exemples car finalement la plupart des chansons sont assez identiques : on en aime une, on les aime toutes ! La différence réside surtout au niveau du chant (les deux compères se partagent les titres) : celui de Nocturno Culto est assez bourrin, ce qui convient plutôt bien ; Fenriz, lui, se garde les morceaux les plus "mélodiques" en déployant des vocalises qui pourront sembler curieuses à certain. Question de goût. En même temps, l'adjectif "mélodique" est à prendre avec des gants : c'est de métal dont il s'agit et Darkthrone, s'il a évolué depuis "A blaze in the northern sky", ne fait toujours pas dans la dentelle.
Pendant l'écoute, un coup d’œil à l'épais livret s'impose : belles photos de randonnées dans les montagnes norvégiennes (les "tent trip") et la fameuse liste recommandée par Fenriz (un fil rouge depuis quelques albums). L'homme s'y connaît en métal et conseille aussi bien des valeurs sûres et célèbres comme Dio (3the last in line") ou Black Sabbath ("Mob rules") que des groupes des 80's passés à quelques encablures du succès : Savage Grace, Griffin, Septic Death...


vendredi 2 août 2013

Pour aller plus loin autour de Mammoth Mammoth...

Une sélection musicale 
"Mammoth Mammoth-like"...
 Blue Cheer : "Vincebus Eruptum"
Ils font partie des pionniers qui ont montré que l'on pouvait faire de la musique avec de l'électricité... Un des premiers murs de fuzz de l'histoire.

 MC5 : "Kick out the jam"
Un live incandescent : des décibels, du feedback, des appels à la révolte, de la sueur....
MC5 distille un rock dur, ancré dans le blues, mais aussi tourné vers les étoiles, lors de mémorables envolées free jazz.

Motörhead : "Overkill"
Un classique indémodable du heavy rock méchant aux racines ancestrales, puisées dans le blues et le rockab'. Il y a sur ce disque des classiques sur lesquels le groupe lui-même, plus de 30 ans après sa parution, ne peut même pas envisager de faire l'impasse en concert ("Overkill", "Stay clean", "Metropolis"), et d'autres qui réintègrent la set-list de temps à autres ("Damage case", "No class", "Capricorn"...).

 Motörhead : "Bomber"
Rarement plébiscité dans les référendums, "Bomber", qui a succédé à "Overkill" quelques mois plus tard, mérite d'être réhabilité (notamment parce que c'est avec lui 
que j'ai découvert Motörhead) !
Ce frère jumeau d'Overkill bénéficie d'une production identique à celle de son glorieux aîné. A l'heure actuelle, le groupe n'interprète plus que "Bomber" (inévitable) et "Over the top" (parfois). C'est dommage parce que cet album renferme des compos variées et de bonne qualité : "Sweet revenge" (lent et menaçant), les bolides "Sharpshooter" et "Stone dead forever", "Dead man tell no tales" (excellent morceau d'ouverture), "Lawman" (mid tempo au texte sentencieux) et "Step down", la seule chanson de Motörhead sur laquelle Lemmy ne chante pas (c'est Eddie Clark qui tient le micro).

Earthride : "Taming of the demons"
Ce groupe est présenté comme la rencontre entre des Hell's Angels en plein "ride" et un concert de Black Sabbath. Le chanteur a croqué des graviers et bu tout le bourbon du Maryland. Les guitares ont fait pire. Le résultat sonore est vraiment proche de Mammoth Mammoth, avec quand même un penchant plus prononcé pour le doom.

The Mushroom River Band : "Music for the world beyond"
Là aussi on n'est pas loin du Mammouth... The Mushroom River Band, avec Spike au chant, propose un stoner rock vindicatif et gras. Un bon disque, malheureusement peu connu.

Orange Goblin : "Time travelling blues"
On ne peut pas ne pas citer Orange Goblin, ce grand activiste du stoner ! Après un premier album assez psychédélique ("Frequencies from planet ten"), le groupe recentre un peu son propos sur les motos, les filles, Motörhead... Résultat : son rock se radicalise, se purifie, suinte l'huile de vidange... mais reste cosmique, voire atmosphérique (la superbe plage instrumentale en conclusion de "Nuclear guru").

Orange Goblin : "The big black"
Dans la même veine que "Time travelling blues", mais version "Monsieur plus" : davantage de fuzz  et de rock n' roll. Les passages aériens / psychédéliques sont quasi inexistants. Le terrain a été déblayé, pour un résultat HEAVY ! Et puis, il y a sur ce disque ma chanson préférée du groupe : la très efficace "Scorpionica", qui ouvre magnifiquement les hostilités.

Bongzilla : "Gateway"
Le record de fuzz de cette sélection ! Un peu plus et c'est la ruche. 
L'obsession de Bongzilla étant l'herbe avec un grand H, on rencontrera surtout des chansons au tempo hypnotique, histoire de "triper" plus facilement. Un album qui vaut le coup, ne serait-ce que pour sa "mise en son" extrême, et qui pourrait très bien aussi figurer dans une autre sélection consacrée à Electric Wizard ("Gateway" : le cousin stoner de "Dopethrone").

Nebula : "To the center"
La pochette déjà est "Mammoth Mammoth-like" !
Et lorsque l'on écoute ce "desert stoner rock", on découvre que Nebula peut mettre la gomme très efficacement mais aussi proposer des compositions plus nuancées.
Un disque finalement pas si monolithique que l'on aurait pu le croire.

Dixie Witch : "Smoke & mirrors"
Un bon disque de "stoner rock sudiste", sans originalité mais idéal pour tailler la route.

Generous Maria : "Command of the new rock"
Encore un bon disque de stoner rock bien balancé, malgré la pochette hideuse. Bruno Bages (cf. Rock Hard : dossier stoner) avait prédit que Generous Maria, fort de ses qualités, ferait sans doute une bonne carrière, mais j'ai peur que ça ne soit pas le cas. Peut-être un certain manque de personnalité... Dommage. Injuste !

The Obsessed : "Lunar womb"
Du très bon heavy rock seventies avec Wino au chant. Souvent classé dans le doom, plus à tort qu'à raison.

Acid King : "Busse woods"
Un power trio très porté sur la drogue et qui se réclamerait davantage d'Hawkwind que de Motörhead. De fait, le son fuzze délicieusement mais le tempo reste assez lancinant. La curiosité vient du fait que la guitare et le chant sont assurés par une nana à la voix claire très inquiétante. Un disque délicieusement fiévreux et malsain.

Down : "Nola"
On appellerait ça du "southern sludge rock"... Peu importe : si Down est représenté ici, c'est sur la foi d'un heavy rock incendiaire comme on en fait peu de nos jours. Les riffs et les refrains sont astucieux, et ils ont du mérite dans un environnement aussi graisseux.

Glow : "Gone but never forgotten"
Un groupe espagnol qui livrait ici son premier album, peu virulent mais avec une excellente relecture des canons en vigueur dans les 70's.

The Sword : "Age of winters"
The Sword est devenu célèbre grâce à Metallica, je crois. Par la suite, ses productions sont devenues plus "mainstream". Mais souvenons-nous toujours que ce premier album offrait aux stonerfreaks un vrai truc d'initiés.

Sleep : "Sleep's holy mountain"
Le disque le plus inquiétant de la sélection. Sous ses apparences de heavy rock complétement fumé, "Sleep's holy mountain" est en fait beaucoup plus instable qu'il n'y paraît. On a toujours l'impression que le groupe est au bord de la rupture. Le chant limite monocorde et les riffs primitifs / hypnotiques n'arrangent rien. "Sleep's holy mountain" : du stoner extrême (d'où la parution de cet album chez Earache).

I used to fuck people like you in prison -
Where the bad boys rock
(Compilation)
On finira la sélection par cette compilation de 25 groupes qui rockent en grésillant (et qui m'a quand même coûté 14 euros sur un marché !). "The Mushroom River Band" et "Nebula" en font partie, mais on retrouve aussi Spirit Caravan, Red Aim, Abdullah, Blind Dog, Solace, Lowrider, Eternal Elysium... et d'autres trucs moins connus comme The Frankenstein Drag Queen From Planet 13 !!