lundi 28 décembre 2020

Raven : "The complete Atlantic recordings"

Cette réédition, à l'initiative du petit label Wounded Bird Records, fait un peu grincer des dents sur Internet : 2 CDs et donc 2 albums par CD, là où beaucoup de gens auraient préféré un mini coffret avec 4 CDs, chacun d'entre eux inséré dans une pochette cartonnée... C'est vrai que pour la repro des visuels de ces sorties chez Atlantic (et les informations censées aller avec), c'est très très (trop) petit ! Il semblerait également qu'il n'y ait eu aucune remasterisation à l'horizon... Mais bon, ne crachons pas dans la soupe d'une initiative qui remet à disposition, pour un prix modique, des enregistrements difficilement trouvables à l'heure actuelle (et, si oui, à des tarifs pas cools).
Pour Raven, le temps passé chez Atlantic se résume à un laps de temps assez court : 3 années (1985, 1986 et 1987), qui ont bien failli avoir la peau du groupe anglais ! 
Et ça démarre avec "Stay hard". Successeur du réussi et prometteur "All for one", cet album ne subit que très peu l'influence d'Atlantic, puisque le groupe arrive avec le gros des enregistrements déjà accomplis. La maison de disques demande juste de réenregistrer un vieux titre ("Hard ride") et finance une session studio pour le futur single "On and on". Raven, quant à lui, invite une section de cuivres pour agrémenter l'instrumental "The bottom line". Le résultat ne se fait pas attendre : les fans se focalisent sur les trompettes du titre précité, le refrain assez "chantant" de "On and on", et qualifient même la production de "commerciale" (c'est vrai que le son est légèrement plus ouvert que d'habitude, mais bon...). Dommage, car, dans le fond et dans la forme, "Stay hard" est un bon disque, dans la pure lignée "All for one" : pêchu la plupart du temps, un poil progressif quand il le faut ("Pray for the sun", le digne fils de "Run silent run deep").
Le virage commercial, le vrai, arrive avec "The pack is back". Atlantic, cette fois responsable de la suite des événements, envoie Raven enregistrer à New York, en compagnie du producteur Eddie Kramer, un disque radio friendly, peaufiné à l'extrême, et qui n'est pas sans rappeler l'orientation qu'est en train de prendre Def Leppard (ils en sont à "Pyromania"), ou bien le contemporain "Turbo" de Judas Priest. Sur "Hyperactive", Raven sonne quasiment funky, et c'est clair que "The pack is back" (la chanson) est calibrée à mort pour se graver dans votre tête (ce qu'elle fait d'ailleurs fort bien). Mais, sous des couches de batterie électronique et de guitare synthé, Raven reste avant tout un groupe de hard / heavy ! De sorte, que les puristes sont déçus et que les ingénus qui n'aiment pas ce style extrême n'accrochent pas du tout. Une pure plantade, et un album qui divise toujours plus de 30 ans après, entre ceux qui l'apprécient (et c'est vrai qu'il faut au moins faire l'effort de le réécouter : ça vaut quand même le coup) et ceux qui le détestent.
La suite, c'est l'EP "Mad" sur lequel Raven démarre sa rédemption : cinq titres issus des sessions d'écriture de "The pack is back" mais qui n'ont pas trouvé place sur cet album... Et pour cause : ils sont plus virulents ! De même, la production se veut plus brute, plus pure, même si le groupe garde son cul entre deux chaises : on entend encore des traces d'arrangements synthétiques ("Speed of the reflex", "How did ya get so crazy"), ce qui n'est pas totalement rassurant. 
Le dernier acte de Raven chez Atlantic sera donc l'album "Life's a bitch" (1987). L'année où Def Leppard embrasse le succès avec le FM "Hysteria", Raven fait volte face et grave un disque "comme au bon vieux temps"... Enfin, pas tout à fait : "Life's a bitch" est un album agité et pas gentil, mais il a un son plus heavy métal que d'habitude (peut-être force-t-on un peu trop le trait de la méchanceté). Bien rempli (13 titres), il affiche également une inspiration en retrait ; une certaine linéarité, un peu comme si les velléités mélodiques avaient été soigneusement rabotées. Mais il est clair qu'un titre athlético-speed tel que "Overload" ne peut qu'apaiser les aficionados de Raven : le groupe a toujours la fièvre, comme à ses débuts, jusque dans les paroles ("Everything louder than everything else"... ça ne vous dit rien ?).


 

samedi 26 décembre 2020

Primal Fear : "Metal commando"

Treizième album pour le groupe qui a accueilli dès ses début l'exceptionnel chanteur Ralf Sheepers : vocaliste sur les 3 premiers opus de Gamma Ray, avant de se faire remercier, principalement pour avoir travaillé d'arrache pied et posé sa candidature pour intégrer Judas Priest (c'est finalement Ripper Owens qui remplacera Rob Halford le temps de deux albums...).
Treizième album donc, et premier pour moi, pauvre auditeur... Quelques chansons croisées çà et là sur des samplers, au cours de ces plus de 20 ans d'existence, mais c'est tout... Curieux car je suis pourtant un inconditionnel de la performance de Scheepers sur le premier album de Gamma Ray ("Heading for tomorrow") : cela aurait dû faire mouche depuis longtemps ! Il aura donc fallu quelques mots-clés au fil des articles et chroniques consacrés à ce "Metal commando" ("retour au métal après des errances", "retour sur Nuclear Blast", "son incisif, compact, thrash comme sur Jugulator") pour déclencher la pulsion d'achat. 
Des regrets ? Que nenni ! C'est vrai que c'est du grand heavy métal. C'est vrai que le son est explosif : il est moins sec et thrashy que sur "Jugulator" (le fameux premier album du Priest sans Halford) ; il est chromé, d'une définition exemplaire et il remplit tout l'espace... Totalement addictif !
L'influence est bien sûr Priestienne, mais pas seulement : ce métal peut aussi évoquer Helloween ("Halo"), Accept ("Raise your fists"), In Flames (le riff / chorus de "The lost and the forgotten"). Et puis, même au sein de la pure chapelle Judas Priest, on peut faire la distinction entre un versant qui sonne plutôt héroïque ("I am alive", "My name is fear"), et un autre davantage porté sur la noirceur et de la violence en germe, se rapprochant justement de "Jugulator" ("Along came the devil" et ses harmonies guitares maléfiques, "Afterlife", "The lost & the forgotten", les couplets de "My name is fear"). Sans compter d'autres éléments assurant la variété de l'album : la ballade "I will be gone" (incroyable car sans batterie et pourtant pas unplugged), et la pièce power prog de plus de 10 minutes ("Infinity"). 
Quant à Ralf Sheepers, c'est un festival vocal : aigu et puissant à la "Painkiller" (de nombreux titres, mais notamment les couplets de "Along came the devil"), beau et brillant ("I will be gone"), menaçant et un brin éraillé ("Hear me calling"). 
Rien à ajouter : une super sortie métal, en attendant le nouveau Accept début 2021 !


 

lundi 21 décembre 2020

Hitchhike : "Téquila!"

Quelle surprise et quel plaisir de retrouver cette "masterpiece" issue de la scène métal Lyonnaise... C'est en 1988 que Hitchhike a publié ce mini LP autoproduit intitulé "Téquila!"... Peut-être même avez-vous encore le 33T original avec le problème d'impression collector sur la pochette (tous les éléments en couleur apparaissaient alors dans des tons rosâtres) ? Ou tout simplement en gardez-vous le souvenir, mais sans grand espoir de remettre un jour la main sur cette pépite ?!
Eh bien c'est chose faite. Quelques tours de CD pour retrouver les sensations de l'époque : en cette fin d'années 80, Hitchhike était un groupe qui franchissait les frontières du simple heavy métal. On peut dire que ça commençait à dépoter, que ça désossait pas mal (cf. les nombreux ossements de l'illustration ?)... Oh, rien de très violent, mais une approche tendant vers la modernité, très basée sur les riffs, ainsi qu'une manière assez originale de poser des lignes vocales dessus (autant en profiter, ils ont alors un chanteur qui a du coffre : Gilles Tess). Sans vouloir spoiler la personnalité de Hitchhike, on peut dire, en guise d'indication, que le jeune Megadeth est un peu en ligne de mire de cette musique (notamment, quelques solos aux intonations très Chris Poland : "Down by the hammer" et surtout "Nuclear's love"). En même temps, on peut aussi penser aux collègues français d'ADX en savourant le speed "Hitchhike" et le petit clin d'oeil latino rigolo à la fin de "Tequila" ; tandis que le riff-galop de "Nuclear's love" et quelques chorus rappelleront furtivement Maiden... En tout cas, il n'y a rien à jeter sur ce mini LP de très bonne tenue ; aussi, continuons à célébrer les Attentat Rock, les Warning, les Blasphème, les Sortilège... mais, de grâce, n'oublions plus de citer Hitchhike à leurs côtés.
Qui dit réédition No Remorse dit bonus tracks et, ici, nous avons droit à la démo "Steel wheels" de 1990. Très intéressant enregistrement, qui jette d'ailleurs un éclairage plus précis sur les influences de Hitchhike. Sur "Steel wheels", le groupe a changé de chanteur : le nouveau vocaliste, William "Wils" Desarsens, est moins lyrique, plus rauque. En même temps, il est raccord avec une musique qui a perdu ses ors heavy métal pour se tourner vers un thrash affirmé, avec un son plutôt compressé (exit la flamboyance). Ainsi, on croisera Metallica à l'occasion du refrain de "Gave it all" (forte ressemblance avec celui de "Whiplash"), des harmonies inquiétantes du très réussi "Please" (au départ, on pense à "Welcome home (Sanitarium)", mais le développement est différent, puisque l'on aboutit même à un superbe solo d'harmonica), de l'instrumental atmosphérique à la basse ayant pour nom "Call of Mars" ("Orion" ? "Anesthesia" ?). Sur les autres titres, les riffs s'enchevêtrent comme des ronces musicales : la fièvre d'Exodus n'est pas bien loin.



lundi 30 novembre 2020

THE BELMONDOS - What Did We Do

Nom de groupe bien trouvé, ambiance sixties et de belles images de Paris... Que demander de plus ?

dimanche 29 novembre 2020

Thundermother : "Heat wave"

2020 : nouvel album d'AC/DC paru mais toujours pas acheté (pas de mauvaise volonté : le hasard)... Mais ça fait déjà du bien de savoir qu'ils sont là et que, à part Stevie, il n'y a pas de "remplaçants" (exit le cauchemar AWR... ouf !!). On évitera seulement les clichés (à tous les sens du terme) d'Angus qui, empêtré dans ses gimmicks visuels, essaye de faire jeune (merci la casquette)... 
L'autre événement hard rock de l'année c'est, depuis juillet, Thundermother. Ici, pas besoin de casquette : elles sont jeunes, elles sont suédoises, elles ont la niaque. Il paraît que "Heat wave" est déjà le quatrième album de ces jeunes filles très électriques ! 
Elles n'ont rien inventé, mais elles ont bien écouté, et s'y connaissent pour faire parler la poudre, en utilisant astucieusement des angles de tir variés. On croisera donc, sans surprise, l'héritage AC/DC : bluesy à la "Gone shootin" sur "Back in '76", ou plus moderne ("For those...","Thunderstruck", "Hard as a rock"...) avec "Free ourselves" et "Heat wave". Sans surprise non plus, des concentrés de rage juvénile : "Dog from hell" (façon Airbourne), l'excellent et speed "Into the mud" qui traite des festivals boueux d'antan (pour le riffing frénétique, cherchez plutôt du côté de Rose Tattoo). Et ce n'est pas fini : une ballade qui s'embourbe un peu mais qui a le mérite de calmer le jeu ("Sleep"), un "Mexico" qui a emprunté de bons piments et d'excellents principes à ZZ Top, et un "Purple sky" assez Woodstock psychédélique. 
D'ailleurs, en parlant de Woodstock, n'oublions pas la voix de la chanteuse Guernica Mancini qui survole le tout, de la même manière que Janis Joplin avait survolé le mythique festival de 1969... 



 

dimanche 15 novembre 2020

Marienthal : "Prohibition"

 
En rééditant "Prohibition", le label No Remorse a mis fin à plus de 30 ans de traque et d'achat de cet album à des tarifs... prohibitifs ! (jeu de mots)
Pressé en 1985 à 500 exemplaires, "Prohibition" est considéré comme un des meilleurs disques autoproduits du hard français. Les auteurs : Marienthal, un groupe de Rouen qui, notamment, comptait dans ses rangs le guitariste / chanteur Patrick Maineult (par la suite plus connu sous le pseudo Pat O'May).
C'est vrai que ce "petit album" (30 minutes) chanté en anglais est bon et attachant. Du hard / heavy mélodique, classe, dont les nombreuses guitares à la tierce conduisent un peu vers l'esprit de Thin Lizzy (particulièrement présent sur le titre "Dickies riot"). Et on n'oublie pas d'être efficace en balançant des chansons légèrement plus teintées "garage rock" ("Open your legs", "Fuckin' car waltz"), qui ratissent au niveau local : les collègues Rouennais fougueux des Dogs, ou encore le voisin énervé du Havre, Little Bob Story.
Jamais avares en bonus tracks, No remorse fournit aussi les 2 titres du 45T "Marienthal" de 1983, plus deux autres chansons enregistrées lors de la même session, mais finalement non retenues. Avec "Marienthal" et "Danger", nous sommes encore loin du hard bien fondé de "Prohibition" : Patrick Maineult se cherche en tant que chanteur et les deux compositions donnent dans un rock progressif / psychédélique assez maladroit et mou ("comédie musicale" sont les termes qui peuvent venir à l'esprit en écoutant ça). Dommage, d'autant que les morceaux écartés étaient beaucoup plus frondeurs : "Refuge" (longue plage solo instrumentale à la fin) et surtout "Cabale" (du pré-"Prohibition" de bonne facture). 
Mais surtout, restez bien jusqu'au bout pour le titre "Voyage" (1984), proposé ici en version démo inédite, et dont une prise live figurait sur la compilation "Rock à Rouen". Franchement, Marienthal aurait vraiment pu percer avec cette chanson drivée, belle et aérienne, totalement dans les standards des tubes rock français de l'époque (Les Innocents, Les Ablettes...).


samedi 31 octobre 2020

Psychose : "Ta destruction"

Psychose fait partie de ces quelques groupes qui ont réussi à propulser le métal Français vers les années 90. Ils faut notamment se souvenir qu'ils ont fait partie de la "fameuse" compilation Metal Rock (volet "Thrash & speed"), aux côtés de pointures internationales (Annihilator, Coroner, Sepultura, Dark Angel...) et de compatriotes souvent en mutation (ADX et son album en anglais "Weird visions", Loudblast venant tout juste d'enregistrer "Disincarnate" à Tampa), n'hésitant pas à taper dans le power heavy classe (Anoxie), le death (No Return, Loudblast), voire le hardcore (Hoax)... Et donc Psychose, avec son titre "Apartheid", fièrement extrait de son premier album "Ta destruction" (1991).

Alors, qu'en est-il de cette bande de copains originaires d'un village de l'Ardèche ? Etaient-ils vraiment si "thrash & speed" que ça ? Ok, un poil de vitesse sur "Enfants martyrs"... Et en ce qui concerne l'aspect thrash, c'est clair qu'ils transcendaient souvent les limites strictes du heavy. Le "drive" d'un Metallica ou d'un Megadeth ("Au nom de dieu le père"), le groove d'un Anthrax et ses chœurs de hooligans ("Seul", "Ta destruction), les riffs tournoyants d'un Coroner ("Le voisin", "Ta destruction"). Egalement, de Metallica, les plages instrumentales lentes avec basse et arpèges (l'intro de "Le voisin", la transition centrale de "Au nom de dieu le père") ; de Megadeth, cette manière, à la "Hangar 18", de placer des micro solos de guitare entre les passages chantés (la fin de "Le voisin"). Mais avec le raisonnable "Horizons limités", on lorgnerait plus vers Maiden (de même que le long passage central instrumental de "Jérémy Clod" emprunte à Steve Harris au moins la structure de ses titres épiques). Au final, inutile de retenir toutes ces références, puisque la meilleure chose que l'on pourrait dire sur Psychose est qu'ils avaient vraiment leur personnalité propre : des riffs intelligents voire étonnants, des refrains modernes et inoubliables ("Seul", "Ta destruction", "Jérémy Clod", "Apartheid", "Enfants martyrs", "Horizons limités"), portés par un chant clair franc et sans fioritures. Ce qui n'empêchera pas le groupe de splitter peu après... Quel gâchis...

Grâce à cette réédition, on peut donc retrouver Psychose dont les membres, comme nous l'explique la bio fournie dans le livret, étaient passés en l'espace de quelques années du statut de grands débutants à un niveau carrément bluffant. L'album "Ta destruction" aurait bien pu se suffire à lui-même vu sa qualité, mais nous avons droit, pour prolonger l'expérience, à quelques bonus tracks : le single "Ni foi ni loi" et la démo "Le combat des chefs" avec le batteur Rémi Allibert au chant (ce qui donne un Psychose un plus roots, voire légèrement punk dans l'esprit) ; la démo "Liberté" marquant l'arrivée du vocaliste Nicolas Fréchet, sur laquelle on entend le groupe évoluer, se positionner (au passage, une version brute de "Jérémy Clod" mais dans laquelle tous les éléments sont bien en place).



 

lundi 19 octobre 2020

Throne of Iron : "Adventure one"

Le label No Remorse Records ne se cantonne pas à rééditer des chefs d'oeuvre rares et / ou oubliés du métal. Ils ont aussi leur propre écurie : par exemple, Throne of Iron, groupe originaire de l'Indiana, qui a sorti son "Adventure one" (premier album, forcément) en 2020.
Cet album de heavy métal épique, très inspiré par l'univers des jeux de rôles, plairait beaucoup à Fenriz (Darkthrone), tellement le son est naturel, pas compressé du tout (ou du moins très peu).
Après une courte narration, "A call to adventure" (le premier titre) débute pour de vrai par un beau riff solennel à la "Electric eye" (Judas Priest). Par la suite, au fur et à mesure des chansons, c'est davantage vers l'influence de groupes plus "confidentiels" (Manilla Road, Cirith Ungol...) que Throne of Iron semble s'être dirigé. A certains moments, lorsque les riffs se font plus linéaires ("Fourth battle of the ash plains"), on peut aussi penser à la musique très envoûtante d'un While Heaven Wept.
Si l'on s'éloigne rapidement de la sphère Judas Priest, c'est aussi parce que le chanteur / guitariste Tucker Thomasson est loin d'être un ténor du genre. Sa voix assez "limitée" (désolé...) est nimbée d'une reverb hall, souvent doublée, et mixée un peu en retrait, ce qui donne un côté incantatoire et très "dark" à la musique (on pense parfois à un vocaliste de black métal qui chanterait des passages en son clair). Curieusement, ce léger handicap confère à Throne of Iron un charme indéfinissable, mais certain. D'ailleurs, c'est lorsque le chant est proche de la sortie de route que la magie opère particulièrement bien : le refrain de "A call to adventure", le long et contrasté "Past the doors of death" (intro en arpèges classiques à la Bathory, belles harmonies tout du long), les couplets de "Allure of silver" (refrain très réussi)... 
On traverse les sept chansons comme une lettre à la poste, pour parvenir à "Wish", délicate et dépouillée outro instrumentale, qui évoque comme un travelling sur un champ de bataille déserté après les combats. Bon, les morceaux se ressemblent tous plus ou moins : il va falloir plusieurs écoutes pour bien les appréhender... Mais ce que l'on ressent tout de suite, c'est cette vibe old school qui fait vraiment du bien aux oreilles.





dimanche 11 octobre 2020

Hölöcäust : "Heavy metal mania - The singles"

Idée géniale : une compilation regroupant 4 maxi singles d'Holocaust (ou encore "Hölöcäust", pour reprendre ce clin d'oeil triomphant à Motörhead).
Holocaust est une légende, un groupe culte... Pour avoir publié du métal dès 1980, ils font partie de la très enviée NWOBHM (ils sont d'Edimbourg, capitale de l'Ecosse). Rappelez-vous de "The nightcomers" le premier album de 1981... Eh bien, deux EPs l'ont précédé ("Heavy metal mania" et "Smokin' valves"), un autre est sorti dans la foulée ("Live from the raw loud 'n' live tour"), et un quatrième l'année suivante ("Coming through"). Avec, à chaque fois, trois voire quatre titres, c'est tout ce matériel devenu rare que l'on retrouve ici.
Heureux possesseurs de "The nightcomers", rassurez-vous : cette compilation fait très rarement double emploi avec cet album fétiche. En fait, il n'y a guère que 3 titres en commun ; et encore, l'hymne "Heavy metal mania" est ici fourni dans sa version courte (sans le dialogue de guitares qui l'introduit longuement sur l'album), et "Death or glory" est en prise live de malade.
Pour le reste, on retrouve tout le charme très particulier de ce groupe, qui a su créer un pont entre le côté très carré du heavy et une approche primitive, simple et rock n' roll de la musique. Le chanteur, Gary Lettice, avec sa voix gouailleuse légèrement approximative, y est pour beaucoup dans l'empreinte un peu punk que laisse dans les oreilles l'écoute d'Holocaust (serait-ce le Johnny Rotten du heavy métal ?). En même temps, il y a deux guitaristes (sauf sur l'EP "Coming through") qui ne se privent pas de jouer, de temps à autres, au jeu des twin guitars (toutes proportions gardées : on n'est pas non plus chez Thin Lizzy).
Les chansons défilent, et c'est vrai que si l'on excepte "Heavy metal mania", il faudra plusieurs écoutes pour les apprivoiser : le groupe fournit du matériel assez urgent et n'est pas non plus le spécialiste du riff super original ou du refrain ciselé... On retient quand même très vite le simplissime "Love's power", les refrains de "Only as young as you feel", "Friend of foe" (belle intro), "Coming through" (un vrai bolide), "Don't wanna be a loser", "Good thing going". Quant aux titres en concert du EP "Live from the raw loud 'n' live tour", ils sont néandertaliens et sans pitié (des vrais "Raw power" du heavy) !
Pour finir, le livret est bien alimenté en informations, dates, textes des chansons, documents d'époque... Une fois de plus, les gars de No Remorse Records sont les princes des archivistes du métal, pour notre plus grand bonheur.



mardi 22 septembre 2020

dimanche 13 septembre 2020

Archives Mayhem : "Extrême onction" (in Hard Rock Magazine - septembre 97)

Juste avant la sortie du EP "Wolf's lair abyss", Mayhem opère son grand retour aux affaires musicales. Une interview culte de Hellhammer (batteur)  parue dans Hard Rock Magazine - Spécial métal extrême (septembre 1997).







lundi 7 septembre 2020

Mayhem : "Wolf's lair abyss"

Où étiez-vous en 1997 ?
Certainement à mille lieues de vous imaginer que Mayhem allait sortir de sa tanière et donner à sa légende une dimension plus strictement musicale. 
La légende ? En voici quelques morceaux choisis : les incendies d'églises, le chanteur Dead suicidé (1991), le guitariste Euronymous assassiné (1993) ; le "Live in Leipzig" avec Dead au chant publié en 1993 ; le fameux album "De mysteriis dom sathanas", dont la composition avait démarré en 1987, et qui fut enregistré entre 1992 et 1993 avec un chanteur de session (Attila), un nouveau bassiste (Varg Vikernes, futur assassin d'Euronymous), et un pote (Blackthorn) chargé de terminer certains textes incomplets de Dead. 
"De mysteriis dom sathanas" sort finalement en 1994, et beaucoup le considèrent non seulement comme un chef d'oeuvre, mais aussi comme un album posthume, ce qui est faux puisque, aux dires du batteur Hellhammer, Mayhem n'a jamais splitté. Il a juste opté pour la discrétion, disparu des écrans radar pour mieux se reconstruire autour du chanteur Maniac (déjà présent sur le EP "Deathcrush" de 1987), du batteur Hellhammer ("Live in Leipzig", "De mysteriis dom sathanas"), du bassiste Necrobutcher ("Live in Leipzig") et d'un nouveau guitariste / compositeur (Blasphemer). 
Au travail depuis au moins deux ans, ce line up publie donc "Wolf's lair abyss" le 3 novembre 1997, un EP qui constitue en fait la première partie du futur album "Grand declaration of war" (en ouverture de celui-ci, on peut d'ailleurs entendre le riff final de "Symbols of bloodswords"). Habilement, le groupe a choisi des compositions radicales, ce qui confère à 
"Wolf's lair abyss" une aura extrême qui va rassurer et fédérer les fans : Mayhem est donc toujours une machine de guerre dévouée à la cause du black métal... Ce qui n'empêche pas les chansons, pourtant fort virulentes, d'être habilement construites, avec de vrais riffs ("I am thy labyrinth", "Ancient skin"...) et des moments forts (le fameux pont du titre "Ancient skin", les arpèges inquiétants de "Fall of seraphs" et de "Symbols of bloodswords" )... 
Ce qui n'empêche pas non plus quelques expérimentations. Déjà, le chant guttural de Maniac produit un borborygme assez hallucinant (une sorte de John Tardy du black métal), mais le frontman (Maniac saura démontrer en concert qu'il en est un) sait aussi se transformer en maître de cérémonie malsain, proposant des courts épisodes de voix claires solennelles ("I am thy labyrinth", "Fall of seraphs", "Symbols of bloodswords") ou de narration très inquiétante ("Ancient skin", pour lequel on préférera d'ailleurs la version différente, plus brute, proposée en bonus et originellement enregistrée en amont pour une compilation).
Autre facteur expérimental, qui n'aura échappé à personne, l'intro instrumentale, électronique et bruitiste, baptisée "The vortex void of inhumanity". 
Du black métal, certes, mais très habile et déjà en pleine mutation.



samedi 5 septembre 2020

Iron Gypsy

Bingo !
A force de jouer les archéologues avec le catalogue No Remorse Records, on tombe sur une pépite : un contenu qui "matche" avec vos goûts les plus intimes, les plus dingos... Le fait est que du bon vieux heavy métal façon NWOBHM, ou bien "rêve américain", on ne crache pas dessus, mais on en a déjà des caisses et des étagères...
Avec Iron Gypsy (groupe originaire du Canada), on approche quelque chose de plus rare et de plus brûlant : le rock n' roll (le vrai) nourri à la high electricity, en mutation vers le heavy, avec de temps à autres une bonne dose de speed. Et à tout cela, vous ajouterez la magie primale du power trio.
Cette salutaire compilation est composée des deux seuls enregistrements studio réalisés par cet "obscur" Iron Gypsy : le EP éponyme 4 titres de 1984, et le EP 4 titres de 1988 (sobrement intitulé "Take n°2"). Curieusement, le son du premier est plus agréable à écouter que celui du second, qui sonne plus aigu et grésillant (ce qui ne nuit d'ailleurs pas à la musique). A vrai dire, les deux productions sont, au final, assez roots...
En écoutant "Iron gypsy" (l'EP), on pense à Venom ("Hell 'n' back"), à Motörhead (la double grosse caisse frénétique de "Oh, I need your lovin", le mid tempo menaçant de "For the crown" qui rappelle "Sweet revenge" ou encore "Lawman" sur l'album "Bomber"). Tout du long, cela évoque aussi un petit peu Exciter (moins les vocaux lyriques suraigus du cousin Canadien). Le quatrième titre, "Streetwize", avec ses bruitages urbains et sa basse très en avant, renvoie à une référence plus ancienne : un blues électrique, inquiétant et légèrement funky, façon "Motor city is burning" (la reprise brûlot par MC5, bien sûr).
Le second EP est légèrement différent. Produit quatre ans plus tard, avec un changement de bassiste et de batteur, il semble moins heavy et plus rock n' roll (toutes proportions gardées, "Shaker" rappelant fortement l'univers d'Accept, période "Breaker", dont Iron Gyspsy avait d'ailleurs assuré la première partie). Mais le fait est que l'on sent le groupe revenir aux fondamentaux : le boogie rock très basique de "(In a) rock n' roll band" (Status Quo es-tu là ?), les "na na na na na na na na na na na na na" un peu énervants de "Now or never", la ligne vocale des couplets de "T.A.W" tellement téléphonée que Guns n' Roses utilisera la même, quelques années plus tard, sur "Bad obsession" (à moins qu'il ne s'agisse d'un "emprunt", n'est-ce pas ?). On reste quand même sur une certaine urgence bien agréable à déguster, mais il est clair que le premier EP est plus génialement "griffu" que son successeur...





jeudi 27 août 2020

Idol Rich : "Working girls"

Qui se souvient des bandes rayées d'Idol Rich ? Pas grand monde, hélas... 
La bio incluse dans le livret de cette compilation nous explique pourtant que l'EP "Working girls" s'était très bien vendu dans les magasins spécialisés de Londres. Nous étions en 1985, après la NWOBHM donc... 
Bien des années plus tard, le label No Remorse nous offre les 4 titres de "Working girls", agrémentés de 3 autres enregistrés dans la foulée (fin 1985), et 2 autres datant de 1987, avec un line up remanié (la dernière mouture avant l'extinction des feux). Trois sessions différentes, mais l'ensemble s'articule vraiment très bien (surtout au niveau de la production que l'on pourrait qualifier de "professionnelle") pour former, de façon inespérée et inédite, un véritable album longue durée.
Groupe britannique, Idol Rich présente une "anomalie" qui pourrait induire en erreur un auditeur interrogé sur la provenance de la formation : hormis le système "so British" à deux guitares, cette musique sonne très U.S métal (à chacun de décider si c'est glam ou pas...). Détail amusant : sur les deux titres de 1987, le chanteur d'origine (Lee Silver) est remplacé par Snake, le vocaliste de Tobruk, autre groupe anglais lorgnant fortement vers le rêve Américain...
Les quatre chansons de l'EP original sont vraiment enthousiasmantes : tout particulièrement "Dirty dreams" (l'hymne du groupe, sans aucun doute) et "City streets" (plus fonceuse et revendicatrice, presque "juvénile"). Pour donner un ordre d'idée, ce serait la carrière solo d'Ozzy Osbourne qui pourrait se trouver dans la ligne de mire musicale d'Idol Rich (les premiers albums, en particulier ceux avec Jake E. Lee). 
Ensuite, au niveau des titres inédits, ça change un peu.
Quelques effluves de Van Halen par ci par là : la power ballade "All for your love" et son riff staccato classe à la "Ain't talking about love", ainsi que "Just when I thought" pour sa façade entertainment fraîchement repeinte. Avec "One step", on pense à Europe, les claviers en moins. Pas de feeling particulier concernant "Fire fire", si ce n'est que l'on remarque le plan électro au séquenceur qui démarre la chanson. Le cas le plus étrange reste "Into the sky" : ici, Idol Rich se frotte à une sorte de speed métal mélodique. C'est vraiment très bien fait, mais ce n'est pas trop raccord avec le reste et, pour le coup, le groupe s'éloigne des côtes Américaines le temps d'un morceau, pour se rapprocher d'un Helloween bien Européen.
Peu importe : rappelons-nous que toutes ces chansons n'ont pas été conçues, à la base, pour se retrouver sur le même support. On y croise donc, forcément, des titres de travail, des ébauches d'orientations futures... Mais, malgré des influences variées, le tout reste cohérent, et surtout abouti. Détail amusant : on remarque à peine le changement de chanteur sur les 2 dernières chansons, leurs timbres étant vraiment très proches. Si ça aussi ce n'était pas de la cohérence...



mercredi 19 août 2020

Q5 : "Steel the light"

Pour faire court, Q5 est un groupe originaire de Seattle, dont l'un des membres éminents est le fameux guitariste Floyd Rose (l'inventeur du vibrato flottant qui autorise tous les excès), et ce premier album a été enregistré en 1984.
Avec Q5, autant être clair dès le départ : il ne faut pas trop se fier aux éléments qui peuvent renvoyer une image "futuriste". Mettons d'emblée de côté le dessin de la pochette (superbe), le look des musiciens (ridicule), mais aussi l'incroyable morceau-titre (épique) avec ses synthétiseurs spectraux et son rythme lent et galopant (paradoxal mais vrai). En vérité, tout cela ne reflète guère le reste de l'album. Q5 n'est pas aventureux comme Queensrÿche (son voisin de Seattle) et pas non plus progressif comme Asia (auquel le visuel fait quand même fortement penser). Ses racines sont plutôt simples : AC/DC (cf. la chanson "Rock on", dont le refrain ressemble d'ailleurs à "Bedlam in Belgium"), The Who, The Angels, Deep Purple... Sauf que le groupe a su habiller ça avec une production chromée et millimétrée. Lorsque l'on ajoute des choeurs bien calibrés ("Ain't no way to treat a lady", "In the night"), le constat s'impose : Q5 chasse sur les terres de Def Leppard. On nuancera juste ce propos en disant que le groupe sait aussi sonner de façon plus heavy ("Missing in action", "Pull the trigger"), ou plus mièvre façon AOR ("Lonely lady"). 
Le dénominateur commun de tout cela, c'est malheureusement que Q5 n'a pas un talent de composition démesuré. "Steel the light" a connu son petit succès (mérité) à l'époque, mais n'est pas devenu un classique.
Profitons néanmoins de l'occasion offerte par No Remorse Records de redécouvrir ce hard n' heavy bodybuildé, un peu FM sur les bords, un peu daté. La réédition est superbe, puisqu'elle comprend un deuxième CD avec du matériel rare ou inédit. La démo de 1984 sonne super bien : on y croise des morceaux qui auraient mérité leur place sur "Steel the light" ("She's a dancer", par exemple) et d'autres qui ont atterri sur l'album mais que l'on peut déguster avec une production plus légère (plus naturelle). Le morceau "Your love is the best love" (démo inédite datant de 1983) est amusant car le son est encore plus roots et la musique rappelle Pat Benatar ! Il y a aussi quelques titres live : "Steel the light" passe très bien l'épreuve de la scène ; par contre, "That's alright with you" (présent 2 fois, et servant de jam pour nommer les musiciens) dilue longuement des riffs basiques qui n'en valent pas trop la peine.


lundi 10 août 2020

Thynn Ice

Le cas de Thynn Ice, groupe de heavy / power métal basé en Californie, est absolument étonnant, totalement anecdotique... 
Ici, le label No Remorse ne met pas sur le marché, comme souvent, une compilation regroupant un single ou un E.P suivi de quelques titres tirés de démos et autres enregistrements d'archive captés en répétition ou en live. Non, "Thynn ice" est un véritable album, totalement professionnel, mixé et abouti, mais qui n'a jamais édité, hormis les 20 copies de "test pressing" ! Incroyable n'est-ce pas ? Surtout lorsque l'on entend la qualité du produit...
Tout est particulièrement affuté sur ce disque datant de 1992 : l'instrumentation, la cohérence, l'interprétation, avec une certaine urgence qui jaillit des enceintes, et ce chanteur incarnant le maître de cérémonie parfait, avec sa voix virile et lyrique à la fois (on pense un peu à Sammy Hagar). 
Au niveau des compositions, on peut souvent ressentir l'influence de Maiden : du "Wrathchild" dans la manière saccadée dont s'articulent les riffs ("Victim of the fall", "Midnite strangler", "One more last time"), une pointe de "2 minutes to midnight" ("Thynn ice"), un peu de "Children of the damned" (la power ballade "Life and death"). Ensuite, ce sera plutôt le drive de Judas Priest ("Runnin' mean"), le côté épique de Dio ("Lies" et son superbe riff qui aurait pu faire chanter les stadiums), et même une approche plus froide et moderne à la Megadeth (la flèche solo de "The sound of mind", l'intro et le développement de "Society's child"). 
Mais nous étions au début des années 90 et le heavy n'était plus très à la mode... La suite, nous la connaissons, et elle a visiblement frappé Thynn Ice de plein fouet.
Alors, cet album éponyme est-il vraiment, comme on nous le dit, le graal du métal U.S ? Un disque absolument underground à diffuser (enfin !) et réhabiliter : oui, ça c'est sûr. D'écoute fort agréable, il ravira tous les fans de heavy, surtout ceux qui recherchent une vibe sortie tout droit des années 80. C'est bel et bien un trésor enfoui. 
Après, il faut relativiser un peu : ce n'est pas un "Killers", un "Holy diver" ou un "British steel" bis. Il y a bien sûr quelques riffs marquants ("Lies", "Society's child") et des refrains qui accrochent bien ("Lies", "One more last time", "Runnin' mean", les lignes vocales agréables de "Life and death), mais ce n'est pas totalement suffisant. 
Finalement, en savourant "Thynn ice", on pense un peu à Grim Reaper : un élève doué, même surdoué, mais qui ne dispose pas du stock d'hymnes lui permettant d'accéder en première division.



jeudi 6 août 2020

Voie de Fait : "Ange ou démon"

Attentat Rock, Fisc, Trust, et ici Voie de Fait : amusants ces noms de groupes français avec une connotation juridique ou capitaliste. Droit pénal, droit des affaires, droit financier... : on le sait, les travers de la société étaient déjà une source d'inspiration dans les années 80.
Fort de son unique album "Ange ou démon", Voie de Fait n'a donc pas dérogé à certaines règles ancrées dans le hard frenchy de l'époque... Avec d'ailleurs un talent certain. 
Il paraît qu'à sa fondation, le groupe était fortement influencé par Ted Nugent. C'est vrai que l'on peut entendre quelques traces de l'écoute prolongée de l'Oncle Ted dans le fameux titre d'ouverture "Pas plus de seize ans", celui-là même que le groupe a interprété fièrement à la télévision française (vidéo disponible sur YouTube). Mais lorsque l'on parcourt cet "Ange ou démon", on peut aussi entendre du jeune Maiden ("Non coupable", et surtout le superbe morceau-titre, avec toute sa théâtralité, sa rupture tragique), du Judas Priest ("Paris Business", "Amnésie" avec son break / solo très caractéristique) et... du Trust. C'est d'autant plus vrai que Voie de Fait produit des textes sociaux assez vindicatifs. Alors, lorsque la musique se fait un peu plus hard rock ("Préjugés", "Images", "Qu'est-ce que je fous là" et son riff / lick lorgnant vers "Antisocial" ou encore "Mr Comédie"), on pense immanquablement à la bande à Bernie et Nono. 
Cela n'empêche pas "Ange ou démon" d'être un classique du genre, bien peu ridé pour un disque datant de 1982. D'ailleurs, Voie de Fait sonnera, quoi qu'il arrive, différemment et toujours plus heavy qu'un Trust, notamment du fait de la voix de son chanteur : le sujet qui fâche (ou qui peut fâcher)... A l'époque, pour espérer sonner métal, il fallait un vocaliste puissant et montant aisément dans les aigus. Le moins que l'on puisse dire est que Voie de Fait avait recruté le bon candidat en la personne de Lounas Ourrad ! Cahier des charges presque trop rempli, les performances de Lounas étant quasiment excessives, au point de rendre la diction périlleuse (certains mots, certaines phrases deviennent méconnaissables, ce qui peut plaire à ceux qui n'aiment pas trop les textes en français). Question de goût : on n'aimera ou on rejettera ce timbre très haut perché ; on le trouvera beau ou carrément agaçant... Reste à admettre que, en plus de l'excellent travail des deux guitaristes et de la qualité des compositions, Lounas Ourrad a fortement (et forcément) participé à forger la personnalité de Voie de Fait.
Merci à No Remorse pour cette réédition : le bon son du vieux métal français à portée de toutes les oreilles et toutes les bourses.


samedi 25 juillet 2020

Masque : "The dead of night"

Masque : ni mauvaise blague, ni jeu de mots douteux en ces temps de pandémie... Mais quand même : si la présente chronique vous intéresse et que vous passez commande, précisez bien qu'il s'agit d'un groupe de métal, sinon vous risquez de recevoir une boîte de 50, jetables, en lieu et place de cette compilation...
Compilation, en effet, éditée par No Remorse Records (comment, une nouvelle fois, vous dire merci pour le boulot que vous abattez ?) et comprenant le fameux EP de 1988 ("The dead of night") et la démo "Confined insanity", enregistrée également en 1988 ; soit, quand on y réfléchit, le pire timing imaginable...
Quelques années plus tôt, Masque aurait pu se prévaloir de la NWOBHM et surfer sur cette vague pour percer, perdurer et ne pas sombrer corps et biens. Car ce groupe, dont les seuls enregistrements sont réunis ici, a su porter haut, même brièvement, l'étendard du heavy métal britannique, à tel point que "The dead of night" est devenu une légende (une légende d'autant plus introuvable avant cette réédition). 
Groupe typiquement anglais donc, et l'on ne cachera pas l'influence évidente d'Iron Maiden sur Masque : des rythmiques galopantes ("Back with a vengeance", "The tell-tale heart"), des breaks typiques ("Watch the children play"), des arpèges aux harmonies glauques façon "Hallowed be thy name" ("The dead of night"), des plans qui renvoient à "Sanctuary" ("Running wild"), à "Murder in the rue Morgue" ("No lights to die by"), à "Purgatory" ("The tell-tale heart")... Sans parler de la basse, forcément assez proéminente... L'ombre de Maiden s'étend indéniablement sur les terres de Masque, mais ces derniers ont quelques atouts pour ne pas rendre cela indigeste ou gênant, au premier rang desquels la présence originale d'une chanteuse (Jo Phipps), dont la voix gouailleuse, puissante et potentiellement haut perchée confère au groupe une empreinte inimitable, aisément reconnaissable. 
Autre cartouche : l'approche juvénile d'un groupe qui n'hésite pas à speeder quand il le faut ("Confined insanity", un peu de blast sur "No lights to die by"), ou encore en appeler à l'énergie vindicative d'un Judas Priest (le refrain de "Running wild", chanson qui n'a d'ailleurs rien à voir avec le morceau du même nom de la bande à Halford). 
Mais ce qui est le plus appréciable, car prémisses possibles de l'évolution de Masque, c'est cet aspect "moderne" qui fait que certains titres, certains passages, certaines structures renvoient au heavy visionnaire de King Diamond. C'est le cas des solis de guitare qui parsèment l'album, du morceau "Confined insanity" (hormis le petit "solo" de basse Maidenien), des nappes de claviers de "The dead of night", des arpèges de "Watch the children play" qui s'insèrent dans la chanson à la façon de "Sleepless nights", de l'intro de "The tell-tale heart"... Il suffit de lire les notes rédigées par Peter Jensko (le bassiste) pour réaliser que le groupe était tout à fait conscient de sa filiation primaire à Maiden et souhaitait  faire un peu le ménage là dedans (ainsi, "Watch the children play" a-t-il été écarté de l'EP pour cette raison). Nul doute que Masque aurait continué à creuser cette voie-là et se serait progressivement écarté de l'orbite de la Vierge de Fer... Le destin en aura décidé autrement.

mercredi 15 juillet 2020

Exodo : "The new Babylon"

Ne confondons pas Exodo et Exodus...
Les premiers sont originaires de la région de Bilbao (Espagne), les seconds viennent de la Bay Area (U.S.A). Les deux groupes ont certes été contemporains, mais Exodo distille du heavy métal, là où Exodus façonne un thrash juvénile et explosif.
Bref, ces formations aux patronymes si proches n'ont vraiment rien à voir l'une avec l'autre...
Et puis, au contraire de ses "collègues" américains, Exodo a disparu dans les méandres de l'histoire ; aussi, la réédition de cet unique album paru en 1988 va certainement surprendre ("Ah bon, il y avait un groupe qui s'appelait comme ça ?") mais surtout ravir !
Avec un cocktail musical mêlant le côté emphatique de Dio à l'aspect dur et tranchant d'Accept, le groupe de Bilbao a vraiment marqué son "The new Babylon" du sceau de la réussite, si ce n'est la production franchement perfectible de cet album. Sur les titres les plus rapides ("Born to be wild", "Thunders in the city", "Sons of the night"), on pense également au speed métal mélodique d'Helloween, et il faut dire que la voix puissante et haut perchée du chanteur y est sans doute pour beaucoup. Remarquable vocaliste (dont le fort accent espagnol rend la prononciation de l'anglais hachée et gutturale, pour un résultat inédit qui participe à la dynamique de cette musique), mais les guitares ne sont pas en reste... Malgré un son hélas un peu "grésillant", on entend heureusement tous les détails. Beau travail en rythmique, mais surtout des solis endiablés qui s'enchevêtrent, et quelques mesures de twin guitars par ci par là. Sur les très speeds "Thunders in the city" et "Sons of the night", le côté néo classique fait des ravages, avec quelques plans vertigineux empruntés à Malmsteen.
Pendant toute l'écoute, "The new Babylon" se déroule tel un tapis rouge, et l'on ne voit pas le temps passer. Le groupe est affuté, bourré de talent et les compositions, variées, sont particulièrement abouties : un break en arpèges façon Metallica au milieu de "Groups of defense" (dont le final original rappelle les trouvailles d'Andy La Rocque chez King Diamond), des nappes de clavier discrètes au début de "Thunders in the city" et pendant le solo de "Sons of the night", le côté héroïque de "Groups of defense" et de "Sex"...
Tout cela pour parvenir à cet incroyable "Heart in flames" (la power balade qui clôt l'album) : de la puissance progressive, du planant à la Foreigner (les nappes de synthé), des choeurs et une mélodie imparable... C'est poignant et ça lorgne de façon inattendue vers un hard FM racé... Décidément, et malgré toutes les références citées ci-dessus, Exodo a vraiment une personnalité propre, pas si facile que ça à appréhender.
Le mieux est d'écouter ce disque, de le découvrir (pour pas mal d'entre nous) grâce à cette réédition prophétique. Au niveau des bonus tracks, pas beaucoup de matériel ni de renseignements : "Mercenario de la noche" (une démo inédite, dont on ne sait pas si elle est antérieure ou postérieure à l'album), une version de "The new Babylon" enregistrée en répétition (qui montre l'excellent niveau du groupe). Mais bon, d'après les notes écrites par le guitariste Enrique "Kike" Villegas, il y avait aussi un single enregistré en 1985 avec les titres "Jezabel" et "Al mira atras" : dommage de n'avoir pas inclus ces chansons, histoire de pouvoir cerner encore mieux ce groupe qui oeuvrait au dessus de la mêlée...

lundi 13 juillet 2020

Ponce Pilate : "Les enfants du cimetière"

Si l'on vous demande, un jour, de sortir le disque le plus étrange, obscur, confidentiel de votre satanée collection, n'hésitez donc pas à exhiber celui-ci...
Oeuvre unique d'un duo (Christian Dussuchal & Yann Parpeix) originaire de la région Centre (Tours / Blois), "Les enfants du cimetière" (1985) se caractérise avant tout par son incroyable degré d'aboutissement, surtout lorsque l'on apprend que tout a été réalisé à compte d'auteur et autoproduit : de l'enregistrement au pressage (500 exemplaires), en passant par la conception de la pochette. Le mensuel "Metal Attack" et quelques radios locales apportent leur soutien au projet, et les disques s'écoulent petit à petit. Aidés par des musiciens additionnels, le duo tente même une participation au Printemps de Bourges, mais Ponce Pilate est finalement écarté des sélections finales, au profit d'un groupe de hard rock plus "conventionnel". Quelques mois plus tard, Christian Dussuchal quitte le navire. L'aventure est terminée.
"Rock païen", rock progressif, hard rock mélodique, traces de métal : la musique de Ponce Pilate est atypique, pas facile à définir. Yann Parpeix, véritable homme orchestre (chant, guitare, batterie, claviers), n'hésite pas à injecter pas mal de synthé et de piano dans l'instrumentation. En fait, les claviers, lorsqu'ils sont présents, ne sont pas de simples décors de fond de mixage : ce sont alors des forces motrices, à égalité avec les guitares, voire carrément mis en avant parfois. 
Alors, on flotte au gré de ces mélodies fort bien ficelées, depuis un "Violence et faits divers" porté par un texte assez "social" et des intonations vindicatives qui rappellent les aspérités de Trust (tout juste atténuées par un délicieux piano bastringue), jusqu'à "La vierge de fer" dont le titre autant que certains passages, basse et guitares toutes voiles dehors, se rapprochent vraiment de Iron Maiden (période "Running free", de toute évidence). Entre temps, on se dit que le lent et ésotérique "Isthar, Vandemm et Gosthal" irait comme un gant au groupe de métal Misanthrope (en guise de reprise), tandis que "Les cloches de l'enfer" (rien à voir avec AC/DC) ou encore "Morphine queen" se la jouent power ballades. Et puis, il y a les morceaux assez sophistiqués dans lesquels le piano est de sortie (le discret "Imagines" et son chorus de guitares jumelles, l'hymne "Ponce Pilate" et sa narration, le provocateur "Les anges de Balthazar" et ses bruitages de plaisir féminin). Là, on pense à Queen, à Savatage, à Uriah Heep... ; bref, à tous ces groupes qui sont allés plus loin que le simple hard rock de base. 
Les textes sont plutôt sombres, mais n'échappent pas, parfois, à une certaine naïveté, voire une voyante  redondance (l'expression "mon corps" qui hante à en avoir mal au coeur "Les anges de Balthazar"). Ce qui est sûr, c'est qu'ils racontent des histoires, des vraies, comme dans ces comédies musicales qui ont si bien égayé la variété française depuis les années 70... Une impression suscitée peut-être involontairement (encore qu'il m'est arrivé de rencontrer d'authentiques métalleux qui se pâmaient à l'écoute de Starmania)... Si l'opportunité d'un deuxième album s'était présentée, Ponce Pilate aurait peut-être gagné à durcir le ton, histoire d'échapper aux vilaines paillettes du samedi soir chez Drucker. Halte aux malentendus.
Une fois de plus, un grand merci aux initiateurs de cette réédition : Christophe Bailet et No Remorse Records. Superbe initiative que de porter à notre connaissance et à nos oreilles cette pièce de choix : l'un des meilleurs albums de rock progressif français ! Comme d'habitude, il y a des bonus tracks issus d'une démo de 1981 : "Elle baise" (superbe faute de goût textuelle autant que musicale, définitivement dézinguée par une voix de tête totalement inappropriée), "Métamorphoses" (qui, comme "Violence et faits divers", rappelle l'univers de Trust), et une version plus simple de "Ponce Pilate" (sans l'intro narrative).

dimanche 5 juillet 2020

The Magpie Salute : "High water II"

Dernier quart de l'année 2019 : parution, comme prévu, du deuxième volet "High water". Seule ombre au tableau : la reformation récente des Black Crowes... Souhaitons donc que The Magpie Salute ne devienne pas une parenthèse sans lendemain. Ce serait un véritable gâchis.
Tandis que nous disposons enfin de l'oeuvre complète, une pensée s'impose : quel dommage que les panneaux du diptyque n'aient pas été fournis en une seule fois. Imaginez "Electric ladyland" en deux livraisons distinctes : aucun sens, n'est-ce pas ? 
... Ou comment susciter les comparaisons incongrues ? Eh bien, comparons (mais utilement).
La suite, la continuité, "High Water II" l'est bel et bien. On notera quand même que ce deuxième chapitre présente une tournure un peu moins acoustique. De temps en temps, l'électricité est même assez débridée (la wah wah overdrivée de "Turn it around", la fièvre de "Doesn't really matter"...). Vu à travers l'angle de son frère jumeau, cela produit un album plus homogène. Initié par le génial "Sooner or later", poursuivi par les rythmes martelés de "Gimme something" et "Leave it all behind", le très orchestré "In here", puis "A mirror" (développement pas à pas, progressif) et les titres déjà cités ci-dessus, on peut même dire que le groove est l'un des composants phares de "High Water II". Du même tonneau, on remarque la présence de chœurs judicieusement construits, qui répondent au phrasé du chanteur John Hogg ("Sooner or later", "Gimme something", "Leave it all behind"). 
Sur tout l'ensemble de "High water" (I et II), la répartition des temps forts , des surprises, des jalons est globalement irréprochable. C'est vraiment une belle oeuvre, et "High Water II" apporte logiquement son lot de petits plaisirs que l'on ne trouvait pas sur "High Water I" (l'inverse étant également vrai) : l'effet big band de "In here" (l'ombre de Springsteen, période "Darkness..." et "Born to run", s'étend un peu sur ce titre), la funk bluesy de "Doesn't really matter", la musique étrange et sinueuse de "Life is a landslide", le côté blues rural lent et légèrement vaudou du morceau de clôture ("Where is this place ?"). 
A réécouter encore et encore.
Mieux : à savourer, si possible, d'une seule traite, les deux albums à la suite !