mardi 30 juillet 2019

Rose Tattoo : "Transmissions - On air 1981"

Concernant ma théorie sur l'archéologie musicale, inutile de se répéter ou de développer davantage : cf. la chronique du "Live in Brunswick".
Quant à ce providentiel "Transmisions - On air 1981", on pourra presque dire, à l'instar d'un "Into the wild" du rock n' roll, qu'il nous fait nous enfoncer de plus en plus vers des territoires non défrichés, sur lesquels plane un certain danger, rendant l'expédition d'autant plus excitante.
On l'aura compris : les deux points communs de ces douze morceaux fraîchement ressuscités sont, d'une part, d'avoir été diffusés un jour sur les ondes (radio ou télévision) et, d'autre part, que ce fameux jour ait été l'un des 365 de l'année 1981.
1981 : l'aboutissement d'un planning intensif de prestations live et la sortie d'un très attendu deuxième album ("Assault & Battery") au mois de septembre. Une année riche en rebondissements...
Presque interactif, "Transmisions - On air 1981" laisse à l'auditeur le choix de s'immerger dans trois contextes différents : un live à la BBC, sans public et doté d'un son très propre de qualité studio ; un live pour la télévision allemande (Musikladen, Radio Bremen) devant un public restreint, qui semble être arrivé là par hasard et qui est très majoritairement assis ; un extrait du grand concert donné à Paris (Hippodrome de Pantin), capté et retransmis par la télévision française dans le cadre de l'émission "Chorus". 
Avec quatre morceaux proposés à chaque fois, il y a forcément des redites : 2 fois "Bad boy for love", 2 fois "Nice boys" et 3 fois "Rock n' roll outlaw"... Peu importe, on se contente de ce qui a survécu au temps, et la qualité du matériel range rapidement ces considérations au rang de simples détails.
Privée de spectateur, et donc dépourvue d'interaction avec eux, la prestation à la BBC est forcément la moins captivante du lot, tout en étant la mieux "produite". Ceci dit, les Tatts jouent le jeu à fond, et la version rallongée de "Nice boys", par exemple, n'en est pas moins une pièce de choix (même si beaucoup moins explosive que celle de l'Hippodrome de Pantin).
Ce concert de Paris, certes très amputé, va sans aucun doute rameuter des nostalgiques : ceux qui l'ont vu à la télévision, sur Antenne 2, et ceux qui bien sûr étaient sur place, dans la foule. Les techniciens de l'époque n'avaient peut-être jamais enregistré de hard rock auparavant, alors le son est celui d'un bootleg de très bonne qualité, mais bootleg quand même... Néanmoins, il rend tout à fait justice à l'intensité et à la puissance du groupe, avec ce côté moite et cette réverbération propre aux prestations live dans de vastes lieux blindés de monde. Quant aux versions de "Remedy" et autres "Astra Wally" jouées ce soir-là, elles sont décapantes.
Mais la palme revient, à mon sens, au "Live on Musikladen, Radio Bremen". Cette pépite n'est pas nouvelle : le label "Repertoire" nous l'avait déjà refourguée (d'ailleurs sans la moindre indication) en guise de bonus tracks à la réédition du premier album du groupe. Un joyau terne car doté alors d'un son plat, peu engageant... Sur "Transmisions - On air 1981", la remasterisation a fait des miracles, conférant enfant aux Tatts la production idéale, rêche et acérée, qu'ils méritent. De plus, ce "Live on Musikladen, Radio Bremen" est le seul à accueillir des morceaux de l'album "Assault & Battery". Et vous savez quoi ? La version live de "Suicide city" vaut à elle toute seule l'achat de ce disque. Intense, mordante, suicidaire. Le DVD qui accompagne ce package permet d'ailleurs d'assister à une scène d'anthologie : le chanteur Angry Anderson, sur les dernières mesures de "Suicide city", s'étranglant avec le fil de son micro devant cet improbable assortiment de spectateurs apathiques !


jeudi 18 juillet 2019

Rose Tattoo : "Live in Brunswick at the Bombay Bicycle Club - 1982"

Comment la décennie 2010-2020 sera-t-elle analysée / étiquetée par les livres d'histoire ? Une idée ? Non ? Allez, oublions un instant nos dirigeants, le dialogue social, le réchauffement climatique et le Brexit, et tournons-nous vers quelque chose de plus "léger" : si l'on voulait bien utiliser un angle aussi sympathique que restrictif, cette décennie qui touche à sa fin pourrait bien être celle de l’archéologie musicale. Certains diront que c'est hallucinant de voir quels trésors d'ingéniosité les maisons de disques ont dû déployer pour sauver leurs fesses, mais si l'on reste dans le constat pur et dur, on se bornera à compter les exhumations d'enregistrements inédits qui ont eu lieu ces dix dernières années... Et le nombre risque d'être affolant ! 
C'est porté par cette vague-là que nous tenons aujourd'hui ce disque live des Tatts entre nos mains. Trente ans que ces bandes dormaient dans un coin... Incroyable...
Quant au cahier des charges, il est particulièrement alléchant : une heure de rock chaud comme la braise, interprété à la grande époque par le line up historique, et faisant la part belle aux trois premiers albums (les meilleurs). 
A l'écoute, l'interprétation est incisive. Elle est également franche et sans retouche (ces chœurs approximatifs...). Certaines chansons y gagnent un supplément d'âme : le démarrage abrupt de "Out of this place", la partie centrale aérienne et menaçante de "Butcher and fast Eddy", la jam à rallonge de "Revenge" (malheureusement amputée de son cri déchirant final présent sur la version studio), le tempo plus qu'appuyé de "Texas" qui lui retire ce côté sautillant assez agaçant qu'elle avait à l'origine... Et quantité d'autres petits délices : entre autres les parties de slide endiablées de Pete Wells, la voix papier de verre d'Angry Anderson qui semble ne jamais faiblir, la rythmique imparable du groupe...  Toujours est-il que l'on passe une bonne heure de sueur et de rock n' roll en compagnie des Tatts.  
Le seul bémol concerne le son. S'il rend tout à fait honneur à la puissance sonore du groupe, on se serait attendu à une production plus rêche, un peu à la manière du "If you want want blood" d'AC/DC. Ici, on regrettera les guitares un peu trop noyées d'écho et de reverb : une sophistication qui n'est pas vraiment raccord avec la musique brute de Rose Tattoo, mais qui n'est en aucun cas une restriction au plaisir d'écoute procuré par ce disque.


samedi 13 juillet 2019