mercredi 22 février 2017

C.W. Stoneking : "King hokum"

La pochette ne trompe pas sur la marchandise : photo en noir et blanc, habits rétro du dimanche, guitare à résonateur et vieille cabane délabrée.
Quelques mesures alors de "Way out in the world" et l'on regarde, étonné par ce son de 78 tours fatigué, la date de parution du disque (2011). Sur ce titre, l'artiste, juste accompagné de la guitare aperçue sur l'illustration, entonne un blues répétitif aux fortes épices rurales. D'autres chansons, un peu moins monolithiques mais dans le même esprit totalement spartiate suivront petit à petit: "She's a bread baker", "Charley Bostocks blues". On tombe sous le charme, tout en se demandant si cet album ne serait pas une sorte de "Nebraska" coincé dans la faille temporelle de la première moitié du 20ème siècle...
En écoutant "Don't go dancin down the darktown strutter's ball", qui démarre au son d'une cloche sinistre et d'un banjo triste dont les cordes claquent comme un fouet, on réalise pourtant qu'une contrebasse, quelques cuivres et des percussions discrètes viennent épauler C.W. Stoneking dans la réalisation de sa rude tâche d'exhumation de tout un patrimoine musical. Avec un son addictif et toujours aussi "lo fi", les autres titres subiront plus ou moins le même traitement. On retrouvera encore du blues primitif (2 guitares et une poignée de percussions sur "Bad luck everywhere you go"), mais aussi une sublime ambiance saloon / western sur "Goin the country" ainsi que du vieux jazz ("Dodo blues") parfois à quelques encablures seulement du rockabilly ("Rich man's blues"). 
Autre petit plaisir : deux titres chantés et dialogués en compagnie de la vocaliste Kirsty Fraser ("On a christmas day", plutôt early jazz, et "You took my thing and put it in your place" aux résonances country blues). Beaucoup de truculence et d'humour sont véhiculés par ces deux morceaux. Avec "You took my thing and put it in your place", on peut sans doute parler de "hokum", cette musique blues américaine des années 30 aux fortes insinuations sexuelles !
Sur "Handyman blues", qui ferme le bal, la voix de C.W. Stoneking croone particulièrement bien, tandis que les cuivres et les coups de grosse caisse font penser à l'univers un peu déglingué / bastringue de Tom Waits.
"King hokum" : un album génial, décalé, récréatif et beaucoup plus varié qu'on pourrait l'envisager au premier abord. 

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