dimanche 10 mai 2020

Iron Maiden : "The X factor"

Difficile de trouver un consensus, une unanimité, un avis commun fiable sur cet album...  Au fil des chroniques, on l'adore, on le déteste, on le trouve moyen, on encense certains titres que d'autres descendent en flèche... Impossible, je vous dis... Difficile...
Enfin, si : il y a bien quelques certitudes qui émanent de cette oeuvre. D'abord, le feeling sombre qui enveloppe le tout, de la pochette jusqu'à la musique, en passant par les paroles, ainsi, bien sûr, que la voix assez "dark" du nouveau chanteur, Blaze Bailey. Et puis, il y a la période, les circonstances, déstabilisantes : remplacer un vocaliste emblématique mais démissionnaire (Bruce Dickinson), constater que le style de prédilection du groupe, le heavy metal, n'a pas vraiment la cote en 1995, année de sortie de "The X factor". Bref, Iron Maiden entre dans le pire creux de vague qu'il ait jamais affronté...
Il y a encore quelques jours, je ne connaissais pas "The X factor" : le seul album de Maiden manquant à ma collection... Achat effectué, écoutes attentives : je découvre tous les titres avec une oreille toute neuve, à l'exception de "Sign of the cross", présent sur le live "Rock in Rio". Bonne chanson, longue, épique : elle explose en concert ; elle est beaucoup plus terne dans sa version studio, sans être non plus catastrophique... Bizarrement placée en ouverture de "The X factor" car démarrant lentement et posément, on est particulièrement attentif aux premières mesures chantées par Blaze Bailey, d'abord surpris de n'entendre ni Paul Di'Anno ni Bruce Dickinson dans ce contexte musical très caractéristique. Mais on oublie vite, signe que Blaze fait le job très correctement. Il ne déméritera vraiment pas tout au long de cet album, mais on sent vite qu'il manque légèrement de flamboyance, de théâtralité... L'univers Maiden n'est pas totalement fait pour lui.
Ensuite, "Lord of the flies" (bon riff à la "For those about to rock") et le speedé "Man on the edge" (intro style "The evil that men do") se chargent de faire bouger ce début d'album. Ok pour la dynamique, mais honnêtement les refrains sont taillés assez grossièrement. Ils existent néanmoins, on les retient.
Avec "Fortunes of war", "Look for the truth" et "The aftermath","The X factor" s'embourbe dans le mid-tempo invasif. Dommage, car l'intro de "Fortunes of war" est belle, un peu dans la veine de "Infinite dreams" (mais le refrain est simpliste au possible, une vraie purge), tandis que "The aftermath" dégage un feeling plutôt moderne (on pense à Queensrÿche) et présente des lignes vocales réussies. Pas grand chose à tirer, par contre, de "Look for the truth" : un rythme saccadé que l'on pourrait qualifier de "folklorique" ; à creuser quand même puisqu'il aboutira 2 albums plus tard à un futur hymne nommé "Blood brothers" ! En revanche, l'ennui s'installant, on remarque que la production écrase les guitares (on n'a vraiment pas l'impression qu'il y en ait deux) au bénéfice de tout le reste, avec, il faut bien le dire, une mise en avant très claire de la basse de Steve Harris (les contre pouvoirs Dickinson et Smith sont partis, ça se sent)... Si "Sign of the cross" pète en concert mais pas sur ce disque, il ne faut pas chercher plus loin la raison : la puissance des guitares est sacrément mise à mal par ce mix bancal.
Passons à "Judgement of heaven" qui ouvre, à mon sens, la partie la plus intéressante de l'album. Bonne chanson, bien rythmée et assez épique, avec un petit penchant atmosphérique pas désagréable. Intéressante mise en jambes, avant d'aborder "Blood on the world's hand", dont le rendu réussi résulte d'un cas fortuit : suite aux choix de production évoqués plus haut, les nappes de claviers présentes sur ce titre relèguent les guitares très loin derrière, ce qui génère un effet planant totalement inédit chez Maiden (là, je commence à entrevoir pourquoi certains fans aiment tant "The X factor")... En plus, le refrain est bien conçu, et le chant de Blaze convaincant, et même assez vindicatif. 
Album sombre disait-on vers l'entame de cette chronique, et ce ne sont ni l'intro ni la fin de "The edge of darkness" qui pourront démentir cela : quelle mélancolie, quelle tristesse se dégagent de ces harmonies que l'on croyait réservées à la frange la plus extrême du métal. Les lignes vocales sont superbes, poignantes... Dommage, par contre, que le corps de ce titre soit aussi stéréotypé, fonctionnant selon des schémas Maiden déjà vus et revus.
On termine en beauté et en originalité avec "2 A.M." et "The unbeliever". Un peu comme "The aftermath", les deux titres lorgnent vers une approche moderne à la Queensrÿche. Lorsque les guitares passent en son clair, l'impression devient une évidence : ces harmonies ont le son, les inflexions d'une certaine avant-garde du métal. En prime, ceux qui reprochent à Blaze Bailey un manque de puissance peuvent écouter le superbe refrain de "2 A.M." pour constater que ce n'est vraiment pas le cas. Quant à "The unbeliever", on peut dire que cette chanson interpelle via sa construction alambiquée : incroyable riff de basse en intro et outre, mesures complexes, passages calmes, relances... Très bon titre. 
Terminons de manière subjective : le fait est que j'ai adoré voyager dans les méandres de ce disque. Ce n'est pas le meilleur d'Iron Maiden, ce n'est pas non plus le pire, loin de là. Il est définitivement à part et a beaucoup à offrir.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire